Ebony _ Just an illusion . 100 %

(c) *Cocaina


" There's a long long road
To reach your house
I arrived just before
Just before the sunset
And you said ,and you said
Welcome with your eyes
And we said ,and we said
Nothing at all "

- CARTWIIIIGHT ! Vous dormez !

A l'entente de son nom, la jeune homme leva la tête. En face de lui, une femme violacée ressemblant à un énorme bonbon à la guimauve, en moins appétissant.

- Vous êtes à l'université, Monsieur, vous ne pouvez pas vous la couler douce comme cela. Une heure de colle.

Le dit Cartwight cria à l'injustice, s'il n'avait pas dormi cette nuit, c'était parce qu'il venait belle et bien de croiser le regard de la femme de sa vie. Il en était persuadée. Elle s'appelait Johanna Roosevelt et était belle comme un coucher de soleil. Et quand il lui avait parlé, ça avait été comme dans les films, les papillons dans le ventre et les chabadabada. S'il avait écouté son impulsion, il l'aurait emmené à Las Vegas pour l'épouser tout de suite. Johanna était comme les mannequins sur les magasines. Rectification. Johanna était un de ces mannequins sur les magasines. Une vraie bombe, baby. Chris venait de tomber raide dingue amoureux et pour un peu, il l'aurait presque annoncé à ses parents.



- Tu ne comprends pas, Chris. Tu ne sais pas pourquoi je suis malheureuse. Notre fille vient de naître, mais de mon côté, je perds mon boulot parce qu'avec mes kilos en trop, je ne suis plus bonne à rien.

Chris prit sa femme dans ses bras. Amoureux d'elle comme au premier jour, il ne comprenait pas pourquoi elle était si malheureuse alors que leur petite fille venait déjà de fêter ses deux mois. Cette petite fille se prénommait Ebony, comme Johanna l'avait souhaité, et c'était déjà un bébé très souriant. Chris venait d'ouvrir sa propre entreprise de publicité et cela marchait du tonnerre. Mais Johanna ne supportait plus de rester à la maison, seulement à donner le biberon. Pour elle, elle avait quelque chose d'autre à faire dans le monde, que de changer les couches d'une grincheuse.



- Oui, chérie, je t'appelle pour te dire que je rentrerais tard, ce soir. Oui, je sais, encore. Mais tu sais, il y a beaucoup de boulot à la boîte et vraiment, je dois rester travailler avec les collègues. Ne m'attends pas, je t'aime.

Bien sûr que si, Johanna l'attendrait. Cela faisait déjà 10 ans qu'elle se privait pour lui, qu'elle était la mère au foyer qu'il souhaitait qu'elle soit. 10 ans qu'elle n'exercait plus aucun métier, aucune activité, alors si, elle l'attendrait. Et tous les soirs, c'était le même cinéma, il l'apellait pour lui dire qu'il serait en retard. Johanna ne savait même plus la date de la dernière fois où ils avaient fait l'amour. Et elle se doutait bien de la triste vérité qui se cachait derrière cela. Oui, il la trompait. Peut-être avec une de ses collègues, ou sa secrétaire. Les beaux discours du genre "tu es la femme de ma vie" étaient bien loin. Et ce soir là, les larmes coulèrent longtemps sur les joues de la belle Johanna, alors qu'elle luttait pour ne pas s'endormir, et l'entendre "encore cinq minutes.".



- Regarde, c'est la fille Cartwight. Tu savais que son père trompe sa mère. La pauvre. En plus de ça, il devient alcoolique, apparemment. Et il ne peut plus voir sa femme en peinture. Les scènes de ménage vont bon train, quel environnement pour grandir !

Ebony baissa les yeux, pour faire comme si on ne parlait pas d'elle et de sa famille. Elle baissa les yeux pour se contrôler et ne pas se mettre à pleurer. Quand son père rentrait à l'heure à la maison, c'était saoul. Johanna tentait de cacher les bouteilles à la maison, mais il finissait toujours par mettre la main dessus. Et à à peine 13 ans, Ebony devait le supporter dans un état pareil. Encore, s'il se contentait d'être saoul, ça aurait pu passer. Sauf que là, il en devenait violent. L'alcool mauvais, apparemment. Ebony tentait de protéger sa mère autant qu'elle pouvait, mais plus le temps passait, plus il devenait incontrôlable. Ebony n'en pouvait plus, elle était à bout. Et comme sa réputation était plutôt bonne au collège, elle devait continuer à garder la tête haute et à paraître heureuse. Les apparences avant tout, lui aurait conseillé sa mère.



- Hum, chérie. Papa et moi avons quelque chose à t'annoncer.
- Vous allez divorcer, c'est ça ?

C'était l'espoir que l'on pouvait lire sur le visage de l'adolescente de 16 ans. Avec ses airs de parisienne un peu trop chiquement habillée pour son âge, elle avait l'air d'une poupée.

- Non, ce n'est pas cela.
- Ah donc vous n'allez pas...
- Ecoute ta mère !

La voix de l'homme de la famille venait de trancher. Ebony se recula un peu dans sa chaise, n'osant pas affronter cet homme qu'elle ne reconnaissait pas.

- Papa est malade.
- Ah... Et ?
- C'est un cancer. Ca va être une épreuve très difficile pour nous trois à passer.

Et pendant plus d'une heure, ils lui expliquèrent que son père allait s'en sortir mais qu'il allait falloir l'aider. Un cancer de la gorge... Ebony n'était pas bête, si son père n'avait pas bu comme trou et fumé comme un pompier, il ne serait certainement pas dans cet état-là aujourd'hui. Alors elle lui en voulait. Parce que Johanna était toujours amoureuse de lui. Et que lui, il s'envoyait en l'air avec toutes ses pétasses. Donc non, elle ne l'aiderait pas.



Ebony était en cours de mathématiques. Entrain de discuter avec sa voisine, comme toujours. Elle parlait de ce garçon si particulier, Edward, qui faisait tant d'effet à la jeune femme. Ce garçon, elle ne le savait pas encore, allait être sa première fois... Qui la larguerait trois jours plus tard. Mais revenons-en à la situation. Quelqu'un frappe à la porte.

- Mademoiselle Cartwight, pouvez-vous me suivre ?

Depuis quand le directeur se déplaçait en personne ? Quand Ebony aperçut sa mine triste et désolée, elle arqua un sourcil. Puis il resta dans le couloir avant de lui dire :

- Je suis désolée, Mademoiselle, mais votre mère vient de m'appeler et... Votre père est décédé il y a une heure. Elle souhaite que vous la rejoigniez à l'hôpital.

Ebony resta à le regarder un instant. Ca ne lui faisait pas mal du tout. Du moins, c'est ce qu'elle pensait.



Et s'ils se réuniaient aujourd'hui, c'était pour permettre à son père de rejoindre Dieu au ciel. Si ça ne tenait qu'à Ebony, elle ne serait pas venue. C'est pourquoi, pour se donner du courage, elle but la moitié d'une bouteille de vodka et arriva totalement saoule à l'église. Sa mère trouva bon de lui dire :

- Ne parles pas et tout ira bien.

Ebony s'en fichait que tout aille bien ou non. Elle avait 17 ans et venait de perdre son père, vous croyez que tout va bien ? L'église était bondée quand elle arriva au bras de sa mère, derrière le cercueil en chêne de son père. Elle lança des regards destabilisants aux personnes présentes qui pleuraient. Le début de la messe se déroula bien, jusqu'à temps qu'une prière soit dite... Après le célèbre, "Amen", Ebony ne put s'empêcher de se lever et de dire :

- Hallelujah ! Que Dieu bénisse mon père et son âme de salopard. Vous ne le connaissiez pas. Vous êtes là, à prier pour que son âme aille au paradis, mais vous ne savez pas ce qu'il était. Il n'a jamais été là pour moi. Il a poussé ma mère à arrêter sa carrière. Il l'a trompé à chaque fois qu'il a pu. Il était alcoolique et ce n'est pas pour rien qu'il a eu un cancer. On récolte ce que l'on sème, non ? Vous savez, j'suis bien heureuse qu'il soit mort. Et j'dis pas ça parce que j'suis saoule. D'ailleurs, s'il avait été un bon père, vous croyez que je serais venue bourée à son enterrement ?

Ebony tituba jusqu'au cercueil de son père et souffla toutes les bougies qu'il y avait dessus. Et finalement, elle cracha sur le cercueil, avant de dire :

- Va en enfer.



- Maman, j'ai quelque chose à t'annoncer. Je... Je vais aller faire mes études en Hongrie. J'en ai besoin...
- Mais, mais pourquoi ?
- Parce que l'opportunité d'une nouvelle vie s'offre à moi...

Oui, Ebony avait besoin de prendre son indépendance. Elle ajouta cependant à sa mère qu'elle viendrait la voir à toutes les vacances. Et Johanna accepta à une simple condition, lui financer ses études. Ebony ne pu dire non, bien entendu. Et la voilà qui débarque en Hongrie, en psychologie. D'ailleurs, si elle a choisi cette filière, c'est certainement plus par rapport à son chemin personnel que tout autre chose.